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La création dans la vie du croyant
La création est une notion que les croyants de toute confession appréhendent à des degrés divers. L’homme a été créé ainsi que tout l’univers par Dieu. La création est constituée du monde tel que l’homme le voit mais aussi de l’infiniment petit et de l’infiniment grand, à cela s’ajoute le monde invisible (al ghayb) regroupant les anges et les djinns entre autres.
Le musulman en tant que croyant a une relation particulière avec la création, cette création le lie à Son Créateur. Comment le musulman perçoit-il alors la création dans sa vie d’homme, de croyant ? Il sait que Dieu existe, qu’Il est le Créateur (al khaliq) mais entre le fait de savoir et le fait de vivre sa spiritualité avec cette notion implique une relation avec Dieu différente.
Notre Seigneur, dans Son infinie Bonté, a doté l’homme d’yeux pour voir, d’une tête pour réfléchir et d’un cœur pour méditer sur la création.
I- DES YEUX, POUR VOIR
Le musulman est doté, comme tout être vivant, du sens de la vue. Elle lui permet de se diriger, de lire, de regarder, de voir. Mais en tant que musulman, comment regarde-t-il le monde qui l’entoure : avec l’œil de l’habitude qui ne voit plus rien ou avec l’œil du croyant qui s’émerveille à chaque instant de la Puissance divine ?
1) La diversité dans la création
L’homme possède le sens de la vue et il remarque que le règne animal et végétal est composé d’une multitude d’espèces. Les savants ne connaîtront jamais l’ensemble des créatures animales ou végétales habitant la Terre. Ainsi certaines espèces sont inaccessibles à l’homme comme les profondeurs abyssales. Le chercheur a pu, grâce aux progrès scientifiques, faire des découvertes, avoir un aperçu du monde abyssal, mais tellement minime par rapport à son immensité. Combien d’espèces, de variétés, peuplent la Terre dont l’homme ignore tout ? Plusieurs vies d’hommes ne sont pas suffisantes, tellement la création est vaste. Et l’homme n’est-il pas surpris par tant de variétés alors que la soi disant « source » est la même pour toutes les créatures ?
Dieu a dit : « et les multiples choses aux couleurs si variées que Dieu a répandues pour vous sur la Terre, ne sont-elles pas un autre signe pour des gens qui raisonnent ? » (sourate 16 verset 13).
« Sont également de couleurs différentes, les hommes, les animaux et les bestiaux. Et c’est ainsi que, de tous les serviteurs de Dieu, seuls les savants Le craignent véritablement. En vérité, Dieu est Puissant et Clément. » (sourate 35 verset 28)
« Votre propre création et la multiplicité des espèces animales constituent aussi des signes pour ceux qui croient avec certitude ». (sourate 45 verset 4)
1.1) Les espèces
Il est intéressant de voir dans une famille le nombre d’espèces qui existent. Chez les oiseaux par exemple, on dénombre un peu moins de 10 000 espèces sur les 1 500 000 espèces d’animaux peuplant la Terre ; et dans ces 10 000 espèces d’oiseaux les hirondelles rustiques sont au nombre de 220 millions (1). Chez les félins, il existe notre chat (siamois, persan, angora, sphynx, sacré de Birmanie….), le lion, le guépard, le lynx, le puma, le jaguar, le tigre, même morphologie osseuse mais avec des différences physiques, alimentaires, environnementales. De plus, au-delà des espèces, un animal peut devenir un autre animal. L’exemple le plus frappant est celui de la chenille qui devient le temps d’une courte vie un magnifique papillon.
Pourquoi n’existe-t-il pas une seule espèce de fourmis, de papillons, d’oiseaux, de félins… ? Pourquoi certains animaux courent, d’autres volent ? Dieu a diversifié Sa Création pour que l’homme regarde à travers la création la Puissance divine.
1.2) Les couleurs
Une particularité du monde animal est celle des couleurs. La couleur est un signe, un code dans le règne animal : elle est un instrument de séduction chez les oiseaux notamment où les mâles sont revêtus d’un plumage splendide pour sa « belle » ; elle est un signe de danger chez les dendrobates (petites grenouilles d’Amazonie ayant des couleurs très vives : jaune, bleu, rouge mais dont la peau sécrète un poison mortel), chez la coccinelle (rouge = « je ne suis pas bonne à manger »), chez les abeilles, les frelons ou les guêpes où les couleurs jaune et noir signifient également danger.
Certains animaux ont une couleur qui leur permet de se confondre avec le paysage qui les entoure : imaginons un instant un lion avec un pelage blanc ou rouge, génial pour la chasse ! La couleur est la tenue de camouflage idéale : le lion peut s’approcher de ses proies sans être vu car il est couleur locale « jaune savane » mais est très repérable au moment de la saison des pluies quand la savane prend une teinte verte herbe fraîche. Le zèbre quant à lui, a une tenue rayée non parce qu’il a décidé de s’habiller en bagnard mais tout simplement pour troubler la vision du prédateur. Quand le zèbre est en troupeau, les rayures se confondent et le lion a du mal à distinguer un seul animal.
Et puis, la merveille de la nature en matière de couleur, de camouflage est le mimétisme. Il se retrouve surtout chez les insectes mais il existe dans le monde marin parmi les dragons de mer (sorte d’hippocampes) ou chez certaines petites crevettes, ils prennent alors la couleur du corail qui les abrite. Pour les insectes, il s’agit du fait de ressembler au support sur lequel il se trouve afin de passer inaperçu pour ne pas être mangé (cas des papillons ayant l’apparence d’une feuille, des phasmes par exemple) ou pour chasser à l’affût (cas des mantes religieuses).
Le monde animal est un constant rappel pour le croyant : la couleur joue plusieurs rôles : une couleur pour faire peur, une couleur pour se cacher, une couleur pour séduire. Et cela, par le plus pur des hasards ?
1.3) Les formes
Dieu nous dit dans le Coran : « Et la Terre ne comporte-t-elle pas des terrains qui se touchent et qui sont complantés de vignes, de céréales et de palmiers dattiers, en touffes ou solitaires ? Et bien qu’une même eau les arrose, Nous leur faisons produire des fruits plus savoureux les uns que les autres. N’y a-t-il pas là encore des signes pour des gens qui raisonnent ? » (sourate 13 verset 4)
La nourriture est aussi un rappel. Nous mangeons, nous dégustons, nous nous délectons de la saveur d’une grenade, d’un litchi, d’une grappe de raisin : c’est sucré, c’est doux ; nous sommes surpris par l’amertume, l’acidité du citron. Il est normal, n’est ce pas, d’avoir tant d’aliments sur notre table ? Il est normal qu’il existe des grappes de raisin mais qu’il n’existe pas des grappes de pommes ? Il est normal que la pomme pousse dans un arbre et qu’elle soit ronde et non allongée comme la poire ; et il est normal que le melon pousse à terre ?
Dans ce que vous avez dans votre assiette, il y a des signes pour ceux qui veulent voir.
Dieu Tout Puissant nous montre à travers le livre de la Création que les couleurs si belles, si variées, que les formes, que la variété des espèces sont Son Œuvre et qu’Il est Capable de tout alors que nous sommes incapables sans Son Aide.
2) La Puissance de Dieu dans la Création
Cette Puissance divine est relatée dans le Coran quand les peuples insoumis furent punis : « Mais ils le (Noé) traitèrent d’imposteur et Nous le sauvâmes ainsi que ceux qui l’accompagnaient sur l’arche. Nous en fîmes les successeurs (sur la Terre) et engloutîmes ceux qui avaient traité Nos Signes de mensonges. Considère quelle fut la fin de ceux qui avaient été pourtant avertis » (Sourate 10 verset 73).
« Dis-leur : « Dieu a le pouvoir de susciter contre vous un cataclysme descendant du ciel ou surgissant de la terre, ou de vous diviser en sectes rivales et de faire goûter aux uns la brutalité des autres. » Regarde comment Nous varions Nos Enseignements afin de les emmener à comprendre ». (Sourate 6 verset 65)
« Et pendant que le tonnerre, en grondant, Lui rend hommage et que les anges, en tremblant, célèbrent Ses Louanges, le Seigneur lance Ses foudres pour atteindre qui Il veut. Et malgré toute cette puissance, les impies osent encore contester Son Existence, Lui dont les ripostes sont si terrifiantes ! » (Sourate 13 verset 13)
Au-delà de cette Puissance punitive, il existe une Puissance visible dans toute la création : l’Univers dans toute sa complexité est géré par Sa Science et Sa Puissance.
Dieu dit dans le Coran : « Que n’observent-ils les oiseaux en plein ciel où rien ne les soutient en dehors de Dieu ? N’y a-t-il pas là des signes pour ceux qui ont la foi ? » (Sourate 16 verset 79)
Les oiseaux sont dotés d’une endurance physique impressionnante qui ferait pâlir de jalousie les plus grands sportifs : la sterne parcourt lors de son voyage migratoire entre 15 000-20 000 Km volant d’un bout à l’autre du globe (2). Tous les oiseaux migrateurs, mais également les mammifères marins tels que la baleine ou terrestres tels que les gnous en Afrique parcourent des distances incroyables pour la recherche de nourriture. Les insectes aussi peuvent être migrateurs comme le monarque (papillon américain) qui descend du Canada vers le Mexique pour se reproduire et passer l’hiver ; la distance parcourue est de 6 000 Km, les monarques meurent sur place et une nouvelle génération fera le chemin en sens inverse (3).
Tant d’exemples pour nous montrer qu’Il n’est qu’Un et que sans Lui le monde, l’univers dans sa grandeur, dans son immensité, dans sa diversité, dans sa puissance n’existerait pas.
Dieu nous dit dans le Coran : « Ne vois-tu pas comment Dieu pousse lentement les nuages, puis les regroupe et en fait des masses compactes du fond desquelles tu vois sourdre de la pluie en abondance ? C’est aussi Lui qui fait descendre du ciel des avalanches de grêle dont Il atteint qui Il veut et préserve qui Il veut, au moment même où l’éclair qui l’accompagne ravit presque les regards. » (Sourate 24 verset 43)
Dans les saisons qui passent, dans le changement de température, dans le soleil qui brûle, dans la pluie qui tombe, dans la nuit qui succède au jour, tout ce qui permet à la vie de poursuivre son épanouissement, Dieu est présent et montre Sa Grandeur.
« Que n’observent-ils le ciel au-dessus de leurs têtes ? Ils verraient alors comment Nous l’avons bâti et paré sans la moindre faille ; et la terre comment Nous l’avons étendue, comment Nous y avons implanté des montagnes et comment Nous y avons fait croître toutes sortes de magnifiques couples de plantes. » (Sourate 50 versets 6 à 8)
« C’est Lui qui a créé la nuit et le jour, le soleil et la lune, chacun voguant dans une orbite bien déterminée. » (Sourate 21 verset 33)
Devant tant de Grandeur, l’homme ne peut que s’incliner, avouer qu’il existe un Créateur pour une si belle création. Il voit la beauté, la diversité, la perfection. L’homme est fait du sens de la vision, c'est à lui de voir le monde qui l’entoure, de prendre le temps de regarder, de contempler. Le musulman a pris ce temps et en prenant ce temps, il considère le monde au-delà du regard.
II- UNE TÊTE POUR REFLECHIR
Le croyant voit mais comment comprend-il ce qu’il voit ? Comprend-il que ce qu’il voit provient de Dieu ? Si tel n’est pas le cas, il sera comme les polythéistes qui vénéraient les statues du vent, de la pluie,… Les polythéistes croyaient en Dieu tout en vénérant des statues qui représentaient le soleil par exemple, ou en cas de sécheresse ils invoquaient leur « dieu de la pluie »… Le fait de dire « je suis croyant » ne signifie en rien que tu es soumis (musulman). Il faut croire en Dieu et uniquement en Dieu et accepter le monde qui nous entoure, accepter la création telle qu’elle se présente à nous.
Dieu nous dit : « Dans la création des cieux et de la terre, dans l’alternance de la nuit et du jour, dans les vaisseaux qui sillonnent la mer chargés de tout ce qui peut être utile aux hommes ; dans l’eau que Dieu précipite du ciel pour vivifier la terre après sa mort, et dans laquelle tant d’êtres vivants pullulent ; dans le régime des vents et dans les nuages astreints à évoluer entre ciel et terre ; dans tout cela n’y a-t-il pas autant de signes éclatants pour ceux qui savent réfléchir ? » (Sourate 2 verset 164)
« C’est Lui qui a fait du soleil une lumière et de la lune une clarté. C’est Lui qui a déterminé les phases de celle-ci afin que vous puissiez dénombrer les années et calculer la durée du temps. Ce n’est pas sans but sérieux que Dieu a créé tout cela. C’est ainsi qu’Il expose Ses Signes pour ceux qui comprennent. » (Sourate 10 verset 5)
« C’est Lui qui, du ciel, vous envoie l’eau dont vous faites votre boisson et qui fait croître des pâturages pour vos troupeaux. Grâce à cette eau, Il fait encore pousser les céréales, les oliviers, les palmiers, les vignes et toutes sortes d’arbres fruitiers. C’est là, en vérité, un signe pour ceux qui savent réfléchir ! » (Sourate 16 versets 10-11)
« C’est aussi un de Ses Signes que de vous montrer l’éclair qui provoque en vous à la fois la crainte et l’espoir, et de faire tomber du ciel une eau qui revivifie la terre après sa mort. Il y a en cela des signes pour ceux qui raisonnent. » (Sourate 30 verset 24)
Dieu s’adresse ici à l’homme en tant qu’être doué de raison. Dans le monde qui t’entoure que vois-tu ? Seulement un arbre, une fleur, de l’eau, des nuages ou comprends-tu, réfléchis-tu que cela vient d’une Force inégalable, un Être Suprême et que cela n’est pas dû au hasard ? Dieu s’adresse à l’homme afin de le pousser à réfléchir ; afin que, du fait de sa réflexion, sa foi soit forte et solide. Une personne qui ne réfléchit pas va, à un moment donné, avoir des doutes et sa foi risque de s’affaiblir.
Dieu dès les débuts de la révélation a demandé à l’homme de s’instruire : « Lis, au Nom de Ton Seigneur qui t’a créé » (Sourate 96 versets 1-2). Le devoir de l’homme est de chercher, d’apprendre et dans les sourates ci –dessus Dieu demande à l’homme de réfléchir sur l’Univers, sur la création.
L’homme est doué de raison, cette raison n’est pas incompatible avec la foi. Dieu nous demande d’être des gens instruits, le savoir en Islam est une valeur fondamentale. Le croyant est celui qui réfléchit au monde qui l’entoure, il pose un regard sur le monde qui est différent de celui du non croyant : « je regarde l’univers, la diversité est autour de moi et cela doit me faire penser à Dieu ».
De nombreux savants, scientifiques sont croyants : en effet leur compréhension du monde dans toute sa grandeur, dans toute sa création, leur a permis de croire en Dieu, rien n’est le fruit du hasard. « De tous les serviteurs de Dieu, seuls les savants Le craignent véritablement » (Sourate 35 verset 28). La théorie de l’évolution a obscurci la raison des gens et même parmi les croyants, beaucoup renie la création divine ; voulant croire que le hasard a pu réussir la perfection. Comment expliquer alors que le hasard a mis neuf milles petits nœuds dans la langue ? pour l’ouïe cent milles cellules dans chaque oreille ? Comment expliquer l’ADN, l’empreinte digitale, de l’iris ? Comment expliquer que chaque zèbre dans la savane a des rayures différentes des autres zèbres ? Comment …. ? Le hasard n’a pas de nous des clones mais des êtres physiquement différents, idem chez les animaux. Monsieur hasard est très fort car la perfection est à son paroxysme dans la complexité de l’œil, du cerveau, par exemple. Tant de perfection multipliée par des milliards d’êtres vivants ne peut être le fruit du hasard. Alors comment expliquer cela ? Seule une Puissance supérieure est capables de créer des êtres parfaits.
La création va donc permettre à l’homme de croire, de réfléchir, de renforcer sa foi. L’homme ingrat, athée, est celui dont les yeux sont aveugles, il avance mais il ne sait pas où il va. Il trouve le monde beau, la vie belle mais pour lui c’est normal.
L’homme doit se poser les bonnes questions : d’où je viens ? Qui suis-je ? Où je vais ? A ces questions, il trouvera les réponses qui le conduiront vers le Créateur. A ces questions, l’homme doué de raison va réfléchir aux buts de sa vie. Il sait que la vie conduit à la mort et la mort conduit au Jugement.
Le regard du croyant envers la création va lui permettre de renforcer son lien envers le Créateur. Quand il posera son regard sur un oiseau en vol, il dira : « Dieu est Tout Puissant, Il est le Créateur par excellence ! ».
Des yeux pour voir, une tête pour réfléchir et un cœur pour méditer, pour s’apaiser devant la Puissance divine.
III- UN CŒUR POUR MEDITER, POUR RESSENTIR
Le croyant, à partir de la création, doit pouvoir se rapprocher de Dieu. Mais comment ? Se rapprocher de Dieu ne se fait pas seulement à travers la lecture du Coran ou à travers la prière. La création est un rappel. Le musulman doit voir la création, ne plus la regarder sans la voir mais la regarder en pensant à son Créateur.
Trois outils vont lui permettre de méditer sur la Création : le Coran, le dhikr et les Noms divins.
1) Le Coran
Dieu nous interpelle dans de nombreux versets sur la création afin de nous pousser à réfléchir. Ces versets ne sont pas seulement adressés aux non croyants ; ils appellent aussi les croyants à méditer.
« En vérité, il y a dans la Création des Cieux et de la Terre et dans l’alternance de la nuit et du jour, tant de signes pour des gens doués d’intelligence, qui, debout, assis ou couchés, ne cessent d’invoquer Dieu et de méditer sur la création des Cieux et de la Terre en disant : « Seigneur ! Ce n’est pas en vain que Tu as créé tout cela ! Gloire à Toi ! Préserve nous du châtiment de l’Enfer ! » (Sourate 3 versets 190-191)
Lorsque ce verset a été révélé, le Prophète (SAW) était en larmes. Quand Bilal est venu le chercher le matin pour la prière, il l’a trouvé ainsi. Il lui demanda : « Ô Envoyé de Dieu ! Qu’est ce qui te fait pleurer alors que Dieu t’a pardonné tes fautes antérieures et ultérieures ? »
« -Ô Bilal ! Et comment ne pas pleurer alors que Dieu Le Très Haut a descendu sur moi cette nuit : « Il y a dans la création des Cieux et de la Terre dans l’alternance de la nuit et du jour, des signes évidents pour les doués d’intelligence » ? » Ensuite il a dit : « Malheur à celui qui lit ce verset sans le méditer. »
Et nous, comment lisons-nous ce verset ? Comment lisons-nous les versets qui parlent de la Création ? Il faut apprendre à se poser, à savoir méditer et à penser au monde qui nous entoure, à sa perfection, à sa splendeur.
Le Prophète (SAW) a pleuré lorsque ce verset est descendu. Notre cœur, lui, reste sec, oubliant, ne réfléchissant pas à ce qu’il lit. Le croyant se perd dans une routine, dans un monde de précipitation et ne se pose plus, ne pose plus de regard sur le monde qui l’entoure, oubliant que la création est un rappel (dhikr).
Dieu dit : « Certes dans l’alternance de la nuit et du jour, dans tout ce que Dieu a créé dans les Cieux et sur la Terre, il y a aussi des signes pour ceux qui Le craignent ». (Sourate 10 verset 6)
« Il a mis aussi à votre service la nuit et le jour, le Soleil et la Lune. Et les étoiles sont soumises à son Ordre. Que de signes à méditer pour ceux qui savent réfléchir » (sourate 16 verset 12).
« Ne vois-tu pas que tous les êtres vivants, dans les Cieux et sur la Terre, célèbrent la gloire du Seigneur, jusqu’aux oiseaux quand ils déploient leurs ailes ? Chaque être a sa manière de Le glorifier et de Le bénir et Dieu comprend parfaitement leurs prières car c’est à Lui qu’appartient le Royaume des Cieux et de la Terre et c’est à Lui que tout fera retour » (sourate 24 versets 41-42).
Comment ne pas méditer quand Dieu nous rappelle dans Son Livre que la création est un rappel, un moyen de se rapprocher de Lui ? Il faut réapprendre à lire le Coran car il n’est pas un roman mais il est le Livre de Dieu, riche en enseignements et en rappels. Dieu nous interpelle sur la création, ce n’est pas pour rien. C’est là un des outils qui va nous permettre d’augmenter notre foi. Il faut se poser dans notre lecture du Coran, prendre son temps, relire les versets qui nous touchent, s’en imprégner, et les versets nous reposent, nous apaisent. Il faut savoir lire et comprendre : lire avec les yeux du cœur et comprendre avec notre foi.
Dans notre rapport à la Création, du fait de ce sentiment d’amour envers Dieu, les musulmans doivent être les protecteurs de l’environnement, les premiers écologistes car cette Terre est création et œuvre de Dieu et il est de notre devoir de la protéger.
Le Prophète (SAW) a dit : « Réfléchissez à propos de la création de Dieu et ne réfléchissez pas à propos de (comment est) Dieu ».
2) le dhikr, les invocations
Se rapprocher de Dieu, être aimé de Dieu sont les objectifs du croyant. Dieu a mis à la disposition du croyant un dialogue permanent avec Lui que sont le dhikr et les invocations.
La répétition de « la illaha illa llah » (il n’y a de dieu que Dieu) permet au croyant d’aimer Dieu en tant que Créateur de l’Univers. Souvent, nous ressentons un problème dans le dhikr, problème de concentration. Remémorisez -vous les fabuleuses images de la Création : coucher de soleil, animaux, fleurs, toutes ces images qui vous touchent lorsque vous les voyez ; visionnez les dans votre dhikr et alors vous serez bien. La création vous rappellera Dieu et Dieu vous rappellera Sa Puissance : « j’aime la création parce que j’aime Dieu et j’aime Dieu parce que j’aime la création ». Dans ce dhikr, je confirme qu’Il est Un mais aussi qu’Il est Tout. L’homme n’est rien, il est né de rien, Lui est Tout. Revenir vers la création, méditer sur la création, c’est revenir à Dieu.
La répétition de « la hawla wa quwwata illa billahi » (il n’y a de force et de puissance qu’en Dieu) nous permet de nous rappeler notre faiblesse, notre petitesse, notre besoin de Lui. Se sentir bien, en paix avec sa relation avec Dieu et la création est un moyen d’atteindre ce but.
De plus, certains versets du Coran sont aussi un rappel ; répétez tous les jours « Louange à Dieu, Seigneur des cieux et de la terre, Seigneur de l’univers. A Lui la grandeur dans les cieux et sur la Terre. C’est Lui, le Puissant, le Sage. » (Sourate 45 versets 36-37). Cette répétition avec le cœur de ces versets est un moyen d’appréhender la création avec le regard du croyant, un cœur qui s’humilie devant Sa Puissance.
Les invocations aussi doivent me permettre d’aimer la création. Demandez à Dieu de L’aimer à travers Sa Création permet au cœur de s’apaiser.
Ne jamais oublier de remercier Dieu pour les bienfaits qu’Il nous donne, qu’Il nous a donné : la vie, une terre aux multiples splendeurs, de la nourriture, de la boisson, tous les éléments qu’Il met à notre disposition et qui nous permettent de vivre.
3) les Noms divins
L’Unicité de Dieu ou At tawhid est le pilier de toute croyance en Islam, c’est ce qui fait d’elle une religion monothéiste. Trois échelons doivent être pris en compte :
- reconnaître que Seul Dieu a créé l’univers et a le pouvoir d’en gérer les grands évènements ;
- reconnaître les Attributs et les Noms que Dieu nous a donnés de Lui sans interprétation personnelle ou représentation ;
- reconnaître que Seul Dieu mérite d’être divinisé et adoré (c’est-à-dire que c’est à Lui seul que le croyant attache son cœur en Lui donnant le maximum d’amour et le maximum de soumission) (4).
Nous connaissons tous les Noms divins, nous les apprenons mais là encore il faut réfléchir sans les interpréter. De nombreux Noms divins se réfèrent à la création : al khâliq (le Créateur), al bâri’ (le Créateur pour les créatures dotées d’une âme), al moubdi’ (celui qui produit sans modèle), al mou’îd (celui qui redonne existence), al mouh’yî (celui qui fait vivre), al moumît (celui qui fait mourir)… (5)
Le Nom divin « al moubdi’ » montre la Puissance divine. Cela signifie que l’homme ne peut créer, il lui faut un modèle afin de pouvoir produire quelque chose alors que Dieu a créé à partir du néant. L’homme est limité dans sa « création », il ne pourra jamais reconstitué un cerveau, un œil à partir de rien ; il ne pourra pas faire un papillon, un moustique… Il fait à partir de ce qui existe : ainsi pour la roue, l’homme s’est tout simplement inspiré du bousier (petit insecte qui constitue des petites boules à partir des excréments des animaux) (6). L’homme n’est pas capable de faire de l’eau : il lui faut la pluie, il lui faut les sources mais si tout disparaissait, comment ferait-il ? Comment ferait-il s’il n’y avait plus de graines, plus d’eau pour faire pousser un arbre, des fruits, des fleurs ? Que ferait-il ? Il demanderait de l’aide à Dieu.
L’homme se croit tout puissant, il n’est rien dans l’univers, tout petit : il ne peut créer mais par contre dans sa folie de puissance il détruit ses semblables, la nature. L’homme ne sait rien créer à partir du néant : « Ô hommes ! Une parabole vous est proposée, écoutez-la : « Ceux que vous invoquez en dehors de Dieu ne sauraient même pas créer une mouche, quand même ils s’uniraient pour cela. Et si la mouche les dépouillait de quelque chose, ils ne sauraient le lui reprendre. Le solliciteur et le sollicité sont (également) faibles. » (Sourate 22 verset 73)
CONCLUSION
Dieu nous a doté de la vision, de la raison et d’un cœur. Le croyant doit conjuguer les trois afin de sentir que la création est un élément indispensable à son cheminement spirituel. Par le regard qu’il porte sur la nature, par sa réflexion sur le monde qui l’entoure et par sa méditation, son amour pour Dieu va augmenter, il se rapprochera de Lui, pleurera devant les merveilles de la Création et dans ses pleurs il sera près de Dieu.
« Ainsi, el Hassan a dit : « la méditation d’une heure vaut mieux qu’une veillée en prière ». Imagine l’importance de ces paroles venant d’el Hassan : tu t’enfermes dans ta chambre, en t’isolant toi-même et en observant la création de Dieu en toi-même ; tu t’assoies en face de la mer, tu te réveilles pour la prière de l’aube et tu observes le lever du soleil en observant comment Dieu fait sortir la nuit du jour et vice versa. La méditation d’une heure est meilleure qu’une veillée en prière.
‘Umar Ibn Abdelaziz a dit : « la contemplation des bienfaits de Dieu est la meilleure des adorations »(7).
« La relation à la nature fut telle dans la vie du Prophète (SAW), et ce dès son plus jeune âge (le message coranique est également traversé de tant de versets renvoyant le croyant à observer, méditer et à voyager) qu’on parvient aisément à la conclusion que la vie à proximité de la Nature, dans son observation, sa compréhension et son respect, est un impératif de la foi profonde » (8).
« On peut tirer un enseignement spirituel de première importance pour l’éducation du Prophète (SAW) autant que pour notre éducation à travers les âges : la proximité à la Nature, le respect de ce qu’elle est, de même que l’observation et la méditation sur ce qu’elle nous montre, nous offre ou nous (re)prend sont autant d’exigences d’une foi qui, dans sa quête, cherche à se nourrir, à s’approfondir et à se renouveler. La Nature est le premier guide et l’intime amie de la foi » (9).
« Eloigner de la Nature, dans nos villes et nos cités, nous semblons aujourd’hui avoir oublié le sens de ce message, au point d’inverser dangereusement l’ordre des exigences et de penser que l’enseignement des techniques et des formes (prières, pèlerinage…) suffit à appréhender et à comprendre leur sens et leurs finalités. Une méprise aux conséquences graves puisqu’elle finit par vider l’enseignement religieux de sa substance spirituelle qui devrait pourtant en être le cœur » (10).
La rédaction
(1) Le peuple migrateur, édition Le Seuil
(2) id.
(3) id.
(4) "Finances et Islam" d'Imane Karich, édition Le Savoir, pages 31-32
(5) Traduction des Noms divins extraite du livre "les Noms divins" de Hani Ramadan, éditions Tawhid
(6) Pour en savoir plus, je vous recommande le livre "Microcosmos, le peuple de l'herbe" de Claude Nuridsany et Marie Pérennou, chapitre "les inventions des insectes", édition de la Martinière
(7) Extrait du livre d'Amrou Khaled "les actes de méditation"
(8) Tariq Ramadan "Muhammad, la vie du Prophète", éditions Presses du Châtelet
(9) id.
(10) id.